Les chemins de la joie, Isabelle Filliozat
1 novembre 2019 par Luci SogorbLA JOIE, ses racines, son expression, sa physiologie, ses hormones, ce qu’elle apporte à nos vies.
Isabelle Filliozat, auteure, psychothérapeute, conférencière, animatrice d’ateliers pour parents et professionnels travaillant avec les enfants, fondatrice de l’École des Intelligences Relationnelle et Emotionnelle (EIREM), membre depuis 2008 du comité de parrainage de l’Observatoire de la violence éducative ordinaire (OVEO) fondé par Olivier Maurel
LES CHEMINS DE LA JOIE (extraits)
Si nous l’éprouvons plus ou moins fréquemment, nous connaissons tous la joie. Savons-nous la faire surgir?
La retrouver quand elle s’efface? Elle peut se trouver face au sourire d’un être aimé, en écoutant une musique, en gagnant une course ou en regardant le ciel.
Est-elle d’ailleurs à rencontrer à l’extérieur ou à éveiller en soi?
Elle surgit parfois sans qu’on s’y attende, comment alors la conserver?
Mais faut-il tenter de la conserver? L’eau dans la rivière est-elle la même à chaque gobelet puisé? La joie est parfois un torrent, parfois un filet ruisselant, parfois une cataracte, parfois un geyser, parfois un lac tranquille.
Elle prend des formes multiples, elle est pourtant toujours la même. Sensation d’allégresse, légèreté, plénitude, chaleur dans le haut du corps, expansion! Elle donne envie de sauter, danser, rire, s’embrasser les uns les autres.
Pêle-mêle, la joie nous étreint quand on rencontre quelqu’un qu’on aime, quand on rit avec ses enfants, quand on danse, quand on écoute ou quand on joue de la musique, quand on chante, quand on joue au foot, quand on peint ou quand on reçoit une lettre d’une personne chérie, quand on se dépasse, quand on signe un contrat inespéré, quand on gagne et par fois simplement en regardant les étoiles ou la mer étale.
On peut éprouver de grandes joies en solitaire ou en groupe, en mouvement ou immobile. Ce qui procure de la joie semble si varié, comment s’y retrouver ?
Ce qui est commun à ces situations, c’est la sensation de la vie qui coule dans nos veines. […]
LA JOIE EST UNE ÉMOTION
y a-t-il une recette? Des conditions sont-elles nécessaires ou utiles? La joie est-elle d’origine génétique, hormonale, électrique, adaptative, émotionnelle et affective, intellectuelle, nutritionnelle, esthétique, spirituelle, sensorielle … ? Un peu de tout cela!
La joie est une émotion, c’est-à-dire une réaction spécifique de l’organisme face à une nécessité d’adaptation.
Si on comprend aisément que la peur nous aide à nous prémunir du danger ou que la colère défend nos droits et notre intégrité, il est plus complexe d’identifier l’utilité de la joie. Elle est juste géniale à vivre, nous pensons souvent qu’elle n’a pas besoin de servir à quelque chose. Certains disent que la nature se fiche que nous ayons du plaisir et de la joie de vivre ou non …
Pas si sûr. La nature est économe. Elle ne nous a pas dotés par hasard de l’émotion de joie.
Si l’évolution l’a favorisée, c’est qu’elle est utile!
Dans une étude publiée en 2010, le docteur Gert Jan Pepping•(1) et ses collègues chercheurs ont étudié l’impact de l’expression de la joie des joueurs de foot sur les performances des membres de l’équipe lors de la Coupe du monde et du Championnat d’Europe.
Résultats: lorsqu’un tireur levait ses bras en l’air pour célébrer un but, ses coéquipiers avaient davantage de chance de marquer ensuite que lorsqu’aucun geste exubérant ne suivait le but!
À condition de célébrer, plus on gagne, plus on gagne!
La joie renforce le désir de se dépasser.
Contagieuse, elle nourrit la motivation affûte les perceptions, mobilise les muscles pour l’action et améliore le jeu.
La joie est l’émotion de l’apprentissage. Elle nous pousse à explorer, à expérimenter et nous récompense lorsque nous réussissons.
C’est aussi l’émotion du groupe, de la communion, des rencontres et des rituels. La joie est l’émotion qui nous dit que nous sommes sur notre route et à notre place.
(1)•Gert Jan Pepping est chercheur au Centre du mouvement humain à l'université de Groningen aux Pays-Bas.
EXPRESSION
Comme toute émotion, elle est un phénomène affectif, hormonal et électrique qui se déroule en trois phases: charge tension, expression ou décharge.
La charge est le moment où l’organisme se prépare, mobilise son énergie pour réagir, la tension suit, tout est prêt, mais l’action n’est pas encore déclenchée. Le cœur est gros (au sens figuré), il va éclater mais il n’a pas encore éclaté (toujours au sens figuré). Et la décharge, c’est l’expression, le passage à l’action, rire, cris, danse, sauts …
[…]
Des études•(2) ont montré que rester en posture ouverte les bras en l’air
deux minutes en levant le menton suffit pour augmenter votre sécrétion de testostérone de 20 % et faire descendre de 10 % le cortisol, hormone du stress.
Ce cocktail libère confiance et sentiment d’avoir du pouvoir!
A contrario, si vous baissez les bras et la tête, votre cortisol monte de 15 % tandis que votre testostérone baisse de 15 %.
L’influence corps-esprit se produit dans les deux sens.
Nos pensées, croyances et émotions peuvent avoir une incidence sur notre corps.
L’inverse est aussi vrai.
Nos mouvements modifient nos pensées et dessinent nos sentiments.
•(2)Expérience et talk d'Amy Cuddy
[…]
DES LARMES DE JOIE
On peut pleurer de rage, d’amour, de douleur, de terreur et de joie!
Lorsque des larmes sont dues à une irritation de l’œil, c’est le système parasympathique qui, activant un nerf crânien, suscite la contraction des glandes lacrymales.
En revanche, lorsqu’il s’agit de larmes émotionnelles, le système sympathique est également concerné. Le système nerveux végétatif intervient dans son entier, sans que l’on sache encore exactement ce qui fait quoi.
Nos glandes lacrymales produisent trois types de larmes:
– les larmes basales, qui protègent les yeux par ce film lacrymal entretenu en permanence;
– les larmes réflexes déclenchées par un oignon ou par une poussière pour nettoyer les yeux;
– et les larmes émotionnelles.
Film lacrymal et larmes réflexes sont de l’eau avec quelques ions.
Dans les larmes émotionnelles, on trouve des enzymes, des protéines, des hormones de stress.
Les larmes évacuent une grande partie du cortisol, lequel sinon resterait dans l’organisme, mais aussi de la prolactine (hormone de la lactation, de la libido, du plaisir, de l’orgasme), des endorphines et enképhalines (qui calment la douleur). Les larmes émotionnelles contiennent aussi d’avantage de manganèse oligo-élément impliqué dans la régulation de l’humeur.
RIRE AUX LARMES
Preuve s’il en est que les larmes sont loin d’être toujours tristes, on peut même rire aux larmes!
Les anthropologue: nous disent que nos ancêtres riaient avant de savoir parler.
C’est une onde qui parcourt tous les muscles de note corps. A l’inspiration, le diaphragme ouvre la cage thoracique pour une ventilation maximale. Puis il se relâche pa petites secousses, laissant ressortir l’air en l’air en saccades Le rire est un véritable massage du ventre. Le fin hi, hi hi, le rire franc HA, HA, HA ou le rire plus gras HO HO, HO sont produits par nos cordes vocales. Les épaules entrent dans le jeu, les mains s’ouvrent, les larmes perlent les jambes se décontractent. Les sphincters se relâchent…
On dit que trois minute de rire vont nous faire brûler autant de calories que dix minutes d’aérobic!•(3)
Norman Cousins•(4) s’est soigné et guéri d’un spondylarthrite ankylosante grâce à des films comiques.
•(3)Le rire au service de la médecine. •(4)Norman Cousins, La Volonté de guérir et Comment je me suis soigné par le rire.
Des chercheurs de l’University of Maryland School of Medicin de Baltimore ont comparé les effets des films drôles et des films stressants sur nos organismes.
Résultat, regarder un policier ou un film d’horreur ralentit votre circulation sanguine de 35 %. tandis qu’un bon comique l’augmente de 22 %.
Robin Williams a fait connaître au grand public le travail Dr Hunter Adams dit Patch Adams, dans le film Docteur Patch.
Patch Adams est médecin et artiste de cirque, clown et auteur. Il a fondé une clinique au sein de laquelle amour, compassion et rire sont des soins aussi importants sinon plus que les soins médicaux.
Dans les services pédiatriques des hôpitaux, il n’est pas rare de nos jours de rencontrer des clowns. Ces derniers introduisent l’humour et le jeu, dédramatisent, apportent de la lumière, de la légèreré er du rire aux enfants comme aux adultes. Non seulement ils aident les malades à supporter l’hospitalisation, mais, leur apportant de la joie, ils stimulent la santé en eux.
Rire assure aussi notre santé psychique, Le rire et la joie augmentent les performances au travail.
Des psychologues•(5) ont filmé des dizaines de réunions en entreprise impliquant 350 employés. Ils ont dénombré les blagues et bons mots déclenchant des rires et ont montré qu’ils étaient statistiquement suivis de comportements de résolution de problème, de suggestions de procédures, d’orientation vers des objectifs et d’encouragement entre eux des salariés, Le rire augmente les performances et se comporte comme un ciment social.
Et c’est contagieux! Le petit film viral Merci! de Christine Rabette sur YouTube en est un bel exemple, Dans le métro, un homme se met à rire…peu à peu le wagon est hilare.
•(5)Cerveau&Psycho, n°70,juillet-aout 2001
[…] Merci! de Christine RabetteÉtiquettes : Christine Rabette, Dr Hunter Adams, Gert Jan Pepping, Isabelle Filliozat, Les chemins de la joie, Neuroptimal
Leave a comment